В Нью Йорке, 21 декабря 2020 г
Дорогая Юлия,
Je voudrais te parler aujourd’hui de mes petits rituels, de mes croyances, au sens non pas religieux, mais plus spirituel du terme: ces habitudes que j’ai, qui pourraient faire froncer les sourcils à mes connaissances qui me voient comme un scientifique / ingénieur froid et pragmatique.
Je t’ai déjà raconté comment enfant, tous les jours avant de me coucher, et bien que ne croyant pas en Dieu, ni n’allant au catéchisme (mes parents me laissèrent le choix d’être baptisé ou pas : je choisis de ne pas l’être),. Je répétais dix fois, très rapidement : « Merci Dieu, Merci Vierge ». On voit que ma culture est catholique : chez les protestants, l’adoration de la vierge, ou des Saints, est considérée comme une abomination. Mais pourquoi donc le faisais-je ? Parce-que je n’étais ni ne suis pas dogmatique : je ne crois pas en Dieu, je pense qu’il n’existe pas, mais « Au cas où… » pourquoi ne pas le remercier : ça prenait seulement quelques minutes avant de dormir ! Je ne sais plus exactement quand j’ai arrêté, mais je pense que c’était lié au baptême de ma sœur Justine : quand j’ai entendu le curé dire « En joignant les mains pour prier, tu seras plus productif que dans n’importe quelle autre position », j’ai eue envie de crier, de dénoncer ce nihilisme idiot ! Pour moi la religion c’était quand ma mère disait : « aide-toi, et le ciel t’aidera ! » C’est-à-dire qu’il faut toujours commencer par travailler dur avant de demander de l’aide, serait-elle divine que ça ne changerait pas ! Après cela je suis devenu très athée, et j’ai perdu tout respect pour la religion… jusqu’à ce que je rencontre Arthur, mon ami depuis devenu prêtre. Je t’avoue quand même parfois je me demande encore… c’est un homme intelligent, gentil, mais quand en France ont eu lieu les manifestations contre le « mariage pour tous » il était très actif : j’ai bien peur que la mère l’Église, plutôt que de se servir de son intelligence, ne l’ait changé…
Mais depuis le temps de mon enfance, il me reste tout de même mes petits rituels. Ainsi, quand j’étais étudiant, j’avais pour habitude, pendant les cours, de regarder les professeurs droit dans les yeux, surtout ceux dont les contrôles étaient réputés les plus difficiles, ou bien dont les matières étaient les plus importantes dans les barèmes. J’ai donc passé mes deux années de classes prépas à regarder mon prof de maths, M. Logé, dans ses yeux bleus clairs. Pourquoi ? Parce-que pour moi, au-delà des paroles, des explications sur le tableau noir, c’était comme si avec la connaissance, le professeur pouvait me transmettre une sorte d’énergie, que je pourrai utiliser le jour où
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j’en aurai besoin, c’est à dire pour l’examen ! Quand je « calais » sur une question, je fermais alors mes propres yeux, je me concentrais très fort, et c’est comme si je voyais alors les résultats et leur chemin à travers le regard du professeur ! Fait amusant : bien des années après mon dernier cours de maths, dans un entretien d’embauche, on m’a posé une question… de géométrie. Ça faisait quinze ans que je n’en avais pas fait, mais c’est revenu : « alors euh, on va prendre un point et le projeter sur un plan.?Après on prend le produit scalaire … » « Et si celui-ci est nul ? » « Ah zut, je le savais ! » « L’angle est droit ! » « Ah oui ! » Et la je revis a nouveau les yeux bleus de M Logé, mais avec sa grosse voix il disait : « Mais enfin Géraud, tu as tout oublié ? » En sortant du bâtiment, j’ai dit à haute voix : « Je suis désolé ! »
Mais pour moi, l’énergie, à l’école, ça n’était pas seulement celle des professeurs et de leurs connaissances : c’était aussi l’énergie mentale qui nous permet de penser. Alors souvent, en suivant l’adage «L’union fait la force », quand je m’allongeais sur mon lit dans mon studio d’étudiant, je fermais les yeux, puis je pensais aux étudiants vivant autour de moi, et j’imaginais comme des lignes n’energie nous connectant tous, et qui pouvaient nous aider lors des tests a venir. Et dans l’obscurité de mes yeux clos, je « voyais » les autres, et j’essayais littéralement de projeter cette aide vers eux. Lorsque je dis à quelqu’un que je lui envoie de l’énergie positive, je fais toujours cela : je ferme les yeux, et dans le noir je cherche où est la personne, notamment son regard, et je pense très fort à lui ou à elle, pour lui envoyer de la force, du courage, tout ce dont ils peuvent avoir besoin dans une mauvaise passe, un moment difficile. Parfois, si je sais que quelqu’un est stressé, c’est de la douceur, de la chaleur que je cherche à leur envoyer. Je t’ai raconté que le soir avant de m’endormir, je te parle : « Спокойной ночи Юлия, я тебя люблю ». Je pense alors a ta candeur, ta douceur, ton intelligence, ta gentillesse : ils me donnent toujours un sentiment de calme, de bien-être. Et à ce moment, je me sens proche de toi, physiquement, mentalement, et je t’imagine, nimbée de cette chaleur et de cette belle aura que je ressens pour toi et que j’essaie de partager avec toi.
Voila maintenant six mois que nous nous connaissons. Et ces six mois ont été pour moi magnifiques : en toi j’ai découvert une amie intelligente et empathique, qui m’a ouvert son cœur et son âme, et à qui j’ai ouvert mon cœur et mon âme. Puis nos cœurs et nos âmes se sont plus, et ont guidé nos pas sur le doux chemin de l’Amour. Юлия, toi dont j’adore coucher le nom sur cette feuille de papier avant d’y apposer mes lèvres afin que ce baiser te parvienne… Юлия, je voudrais te dire que ce que je ressens pour toi est extraordinaire. Jamais je n’ai cru possible que quelque chose d’aussi beau et doux existât. Pour moi chacun de tes mots est une caresse, chacun de tes regards est un bonheur, et entendre ta voix est la plus
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douce des mélodies. Lorsque nous communiquons, mon visage s’illumine, car j’imagine toujours ton sourire si radieux. Car c’est aussi quelque chose qui fait partie de mes « croyances » : quand je te lis, comme quand on lit une histoire on voit une scène, on imagine des sons, on sent des odeurs, on ressent une atmosphère : quand je te lis, je t’entends, je te vois, je te sens près de moi. C’est aussi quelque chose que j’éprouve lorsque je me promène et je vois quelque chose d’intéressant : en cet instant, c’est comme si je voyais les choses par tes yeux, et le sourire qui passe alors fugacement sur mes lèvres, c’est le tien : c’est une sensation très étrange !
Pour me relaxer en cas de stress, ou pour me reposer un peu de temps avant de reprendre le travail, j’ai une méthode qui je crois est proche de la méditation : je me couche sur le dos, bras et jambes écartées de façon à ce qu’aucune partie de mon corps ne touche l’autre. Je ferme les yeux, et j’essaie d’imaginer que mon corps est un habit trop grand, et petit a petit, je ne le sens plus, jusqu’à ce que je me sente comme un tout petit être qui vivrait seulement dans mon cerveau. Ça me donne l’impression qu’en forçant un peu, je vais même voler au-dessus de mon enveloppe charnelle : mais je n’ai jamais réussi, comme si le petit bonhomme était attaché dans mon crane. C’est une sensation très agréable : quelques minutes comme cela suffisent à me faire sentir calme et reposé. Mais arriver à cet état demande de la concentration, et pendant des années, je ne l’avais pas ressenti. Depuis la mort de ma chatte en fait : elle se couchait sur mon épaule, ronronnait, et ce massage m’aidait à me relaxer et me concentrer : j’ai même pensé un jour fabriquer un «chat artificiel coussin massant »! pour aider les autres gens à se sentir aussi bien. Mais personnellement, je n’en ai plus besoin. Quand je m’allonge, je t’imagine à côté de moi. Je sens ta chaleur, je sens ta douceur, je sens notre amour. Et depuis six mois, depuis que j’ai réalisé la personne merveilleuse que j’ai la chance de connaître et d”aimer, je suis simplement heureux, paisible, et ta philosophie de la vie, qui n’ignore pas les difficultés mais les comprend et les accepte, éclaire la mienne. Merci d’être dans ma vie Юлия, et je souhaite que nous ayons beaucoup d’autres semestres comme celui qui vient de s’écouler.
Je t’embrasse très fort mon amour, et j’ajoute à cette lettre des baisers qui j’espère, viendront trouver tes lèvres. Я тебя люблю,
Твой мужчина, Géraud