28 juin 2021

В Нью-Йорке, в 28 июня 2021 г.

Моя дорогая Юлия,

Ты помнишь письмо о соседях? Сегодня, я хочу написать тебе о большых соседях!

Avant de nous rendre aux Amériques, je dois te raconter ma voisine du dessous a Paris! Quand je m’installais dans l’appartement, il y avait longtemps que la peinture et le papier peint avaient été mis là, alors je décidais de tout refaire : tel un archéologue, j’ôtais les différentes couches (jaune clair des années 70, turquoise des années 60, marron des années 50), mélange de peinture et de papier peint, jusqu’au plâtre du mur. De même je ponçais les lattes de bois au bas des murs pour les repeindre proprement. Or, poncer cela fait de la poussière et du bruit. Je le faisais seulement une heure par jour, entre 8h et 9h du soir en rentrant chez moi. Mais voila, c’était encore trop pour la vieille voisine qui vivait sous mon appartement. Alors un jour elle monta se plaindre. Elle me demanda de ne faire mes travaux que le samedi matin « quand je vais au marché » car le reste du temps elle ne voulait pas être dérangée pendant qu’elle regardait la télévision. Elle me dit aussi de ne plus faire de bruit en marchant (ce qui était impossible : le sol en bois crissait tout autant qu’un vieux bateau!) et enfin à voix basse : « oh vos voisins devraient réaliser qu’on les entend… même quand ils font des choses au lit ! » Quelques jours plus tard, je vis les voisins en question… l’homme avait un pansement sur le nez. Il m’expliqua que le fils de la voisine, un homme de cinquante ans, était monté le voir en colère, et quand il lui avait ouvert la porte… lui avait donné un coup de poing ! Le ridicule étant qu’après cela mon voisin lui avait dit : « je vais porter plainte contre vous pour coups et blessures ! » et le fils répondit : « Je me suis fait mal au poing, je vais porter plainte contre vous ! » J’espère sincèrement n’avoir pas été la cause indirecte de cette altercation, mais fort heureusement, les choses se calmèrent ensuite ! Ces voisins avaient un chat, « Lisbonne » qui venait me rendre visite en passant par la gouttière. Quand ma chatte Isis vint vivre chez moi, elle le chassât ! Mais elle découvrit aussi la gouttière, ainsi que l’herbe à chats que ma voisine plantait à sa fenêtre. Alors le pauvre Lisbonne, terrorisé, la voyait qui mangeait son herbe en lui grognant dessus, pendant que de ma propre fenêtre, je l’appelais : « Isis, reviens, cette

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herbe n’est pas à toi ! A la fin de mon séjour à Paris les choses s’étaient toutefois arrangées, et quand je cuisinais, j’avais deux chats qui me tournaient autour des jambes !

Quand je demenageai à Champaign en Illinois, après quelques péripéties, Isis put enfin traverser l’océan elle aussi. Je ne connaissais pas mes voisins, mais j’avais deux amis goths qui vivaient près de mon appartement, Scott et Chris. Je t’ai déjà raconté que j’avais pas accident présenté une cleptomane à un ami… c’était Chris ! Grace à eux, pas de soucis pour amener un sapin de Noël à la maison, ou bien s’occuper d’Isis en cas de vacances ! D’ailleurs, lors de mon déménagement a Calgary, c’est Scott qui sauva la journée en achetant un panier à chat souple et en nous l’amenant à l’aéroport… à 4h du matin ! Je leur ai dit à tous les deux de venir me rendre visite à New York, mais jusqu’à présent, aucun n’a fait ce voyage.

A Calgary, je connaissais mes voisins immédiats. A gauche, il y avait un homme âgé qui vivait seul. Il avait été marié, et son épouse et lui-même avaient fui Prague durant le régime communiste. Il m’a plusieurs fois invité à prendre le café, qu’il préparait « à la turque », et il était venu manger un gâteau pour le Nouvel An. Comme je savais qu’il dessinait pour son plaisir, je lui ai offert mes encres de Chine quand je suis parti pour New York. Dans notre couloir, il y avait aussi un couple de rockeurs/metalleux. D’ailleurs un jour on est allé voir un concert hardcore ensemble. Je crois que le garçon s’en souvient encore, car quelqu’un qui « crowd-surfait » lui avait donné une belle bosse ! Mais surtout, il y avait mes voisins d’en face, Ben et Lee, venus d’Australie au milieu d’un hiver où il a fait –35º pendant trois semaines d’affilée ! Lee est née dans une réserve « First Nation » (indigène) près de Calgary. Abandonnée à la naissance, elle fut adoptée par des Australiens qui vivaient la. Ils retournèrent en Australie où elle grandit et rencontra Ben. Mais elle voulait en savoir plus sur ses origines. Elle réussit à rencontrer ses cousins, puis sa sœur avec qui elle est proche. Ils m’invitaient souvent quand ils organisaient des barbecues sur leur balcon. C’est avec eux que je passais ma dernière soirée à Calgary. Depuis, ils sont retournes vivre à Canberra, car ils en avaient marre des hivers canadiens. Mais il y a quelques années, je les ai revus, avec leur garçon, Flynn, et ce ici-même, à New York !

Comme je te le disais dans la première partie de cette histoire, après Paris, je pensais que mon voisin serait Lou Reed. Il se trouve qu’en fait je n’étais pas si loin que cela : il vivait à Chelsea, qui est au même niveau que mon appartement, mais coté Ouest de Manhattan ! Alors je dus me contenter de voisins qui n’étaient pas des légendes du rock n’ roll ! Dans l’appartement jouxtant le mien, quand je m’installais ici,

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vivait une jeune fille, une étudiante prénommée Erin. Je crois t’avoir raconté comment j’ai fait sa connaissance : un soir où son petit ami s’était endormi saoul, elle s’était retrouvée coincée dehors, par –10º, alors je lui avais ouvert pour qu’elle puisse appeler ses parents. Elle m’avait offert une bouteille de vin en remerciement, de même quand je l’avais aidée à entrer chez elle par la fenêtre à cause d’un problème de serrure. Hélas les gens qui l’ont remplacée ne sont pas d’aussi bons voisins. J’ai eu successivement : un avocat dont le chien husky laissé seul pleurait toute la journée ; deux filles qui mettaient de la musique de Britney Spears à fond ; un garçon qui sous-louait illégalement à des vacanciers en Air-BnB ; et en général des gens ne disant même pas bonjour ! Cela paraît être une généralité dans le bâtiment : beaucoup d’étudiants qui restent là peu de temps, et sont malpolis, sales, bruyants, comme des bébés mal élevés !

Pourtant quand je me suis installé ici il y a presque onze ans, il y avait des gens de tous les ages, y compris une centenaire et sa fille dont je t’ai déjà parlées. Il y avait aussi une gentille dame qui parlait un peu Français, nous discutions d’histoire, car elle était curieuse de l’histoire du protestantisme dans la région ou je suis né.

En fait, de mes voisins du 1er Octobre 2010, il ne reste que ma voisine du dessus, Bridget. C’est elle qui a trois chiens très grands, des chiens de berger irlandais, et dont les cavalcades la première fois où je les entendis me firent penser que des poneys vivaient là ! Ma voisine paraît toujours être en colère, mais c’est une bonne personne. Hélas je crois que les fêtes sur le toit n’améliorent pas son caractère ! Mais qui sait… peut-être qu’un jour, on sonnera à la porte, et ce sera Iggy Pop me demandant un œuf ! Après tout, Adèle a failli acheter un appartement dans l’immeuble moderne de l’autre coté de la rue !

Voilà mon amour, моя дорогая Юлия, tu sais maintenant beaucoup de choses sur mes voisins dans plusieurs pays différents. Je t’embrasse très fort, en sachant qu’un jour… nous aurons les mêmes voisins. Я тебя люблю !

Твой Géraud